Annie Boulianne, Conseillère en SST, ASSTSAS
Le bruit peut augmenter le risque d’accident du travail parce qu’il exerce un effet de masque sur les signaux d’alerte. Il perturbe la communication verbale et détourne l’attention.
Les sons proviennent des vibrations de l’air qui se propagent sous la forme d’ondes acoustiques. On parle de bruit lorsqu’un ensemble de sons est perçu comme gênant ou dérangeant. Au-delà d’une certaine limite d’intensité, tous les sons sont dérangeants, voire dangereux, même les plus agréables comme la musique.
De multiples impacts
Troubles cardiovasculaires (ex. : hypertension), troubles digestifs, insatisfaction au travail, irritabilité, anxiété, agressivité, etc., le bruit influe sur la santé physique et psychologique.
De plus, une exposition répétée à des niveaux de bruit élevés peut entraîner une surdité professionnelle. Même à la suite d’une seule exposition à un bruit intense, on peut souffrir temporairement de sifflements d’oreilles ou de bourdonnements (acouphènes) ainsi que d’une baisse de l’acuité auditive.
Ce qui est moins connu, ce sont les conséquences de cette exposition sur la vie quotidienne des employés. Par exemple, l’employé qui associe sa surdité à un handicap ou à la vieillesse aura tendance à la dissimuler et à s’isoler. Il fera de nombreux efforts pour essayer de comprendre les conversations. Il vivra beaucoup de stress, de frustration et d’incompréhension. Sa vie familiale et sociale en sera perturbée. Son entourage croira à un manque d’intérêt pour ses proches ou pour ses activités habituelles. Les déceptions et les conflits pourront se multiplier.
Au-delà d’une certaine limite d’intensité, tous les sons sont dérangeants, voire dangereux, même les plus agréables comme la musique.
Obligations réglementaires
Dans le réseau de la santé et des services sociaux, on retrouve des environnements où les équipements et les machines génèrent des niveaux de bruit élevés, tels que les chaufferies, les salles d’entretien mécanique et les ateliers de menuiserie. Dans certaines situations, le bruit de l’environnement perturbe aussi la qualité du travail, comme à l’accueil, dans des services administratifs, de laboratoires ou de soins.
Au Québec, le Règlement sur la santé et la sécurité du travail (RSST S-2.1, r. 13, section XV) dicte les obligations et les balises concernant l’émission, l’exposition et la réduction du bruit nocif pour l’audition.
Le bruit nécessaire au travail
En général, les types de bruit les plus présents dans notre réseau ne dépassent pas les limites permises par la réglementation. Qualifié « d’agaçant » par certains et « d’insupportable » par d’autres, le bruita représente à la fois une nuisance et une source d’informations. Pour cette raison, son atténuation est un exercice complexe dont le résultat ne doit pas générer de difficultés. Par exemple, le signal d’alerte d’un moniteur cardiaque ne doit pas passer inaperçu et la sonnerie de la cloche du patient doit être entendue.
Le bruit est ressenti de façon différente selon sa signification. En fonction de son contenu informatif, un bruit sera supporté par l’employé pour qui sa présence est nécessaire, alors que les voisins s’en plaindront. La gêne ou l’inconfort est souvent issu d’une incompatibilité entre l’activité de la personne et les caractéristiques sonores de l’environnement. Par exemple, pour une réceptionniste qui répond à un appel alors que des discussions se tiennent autour d’elle, le bruit est dérangeant.
Impacts sur les tâches cognitives
La détection de signaux d’alerte au cours d’une surveillance prolongée est un exemple d’une tâche cognitive qui nécessite un niveau d’attention élevée de la part du travailleur. Le bruit interagit avec les processus cognitifs de façons diverses et parfois contraires en détournant l’attention, en augmentant le niveau d’éveil du système nerveux, en nuisant à la mémorisation et en entraînant la dégradation de la performance en fonction du temps. La performance dans une tâche de mémoire est perturbée par la parole, mais pas par d’autres types de bruit.
Les effets généraux constatés dans de tels cas sont une baisse de la capacité à exécuter des tâches cognitives (apprentissage, tâches complexes, résolution de problèmes), une baisse de la capacité de concentration (augmentation du nombre d’erreurs, diminution de la vitesse de travail) et une augmentation de la distraction. Le bruit augmente le nombre d’erreurs lorsqu’on effectue un travail ou une tâche mentale. Mais lorsqu’il s’agit d’une tâche manuelle, la qualité globale du travail n’est pas affectée.
Qualifié « d’agaçant » par certains et « d’insupportable » par d’autres, le bruit représente à la fois une nuisance et une source d’informations.
Prévenir dès la conception
Il faut retenir que le bruit constitue une nuisance majeure dans le milieu professionnel. Pourtant, il existe des moyens de limiter l’exposition des employés aux nuisances sonores. Toutefois, il demeure préférable de prévoir des mesures de réduction du bruit dès la conception des postes et des environnements de travail, et ce, avant que les problèmes n’apparaissent. Ces mesures seront moins onéreuses et la démarche, si elle est globale, permettra de travailler sur d’autres risques et nuisances, voire sur la qualité des soins et des services.
L’ASSTSAS n’est pas spécialiste de la conception d’environnements acoustiques non bruyants. Cependant, nous pouvons vous accompagner dans vos démarches d’aménagement de milieux de travail moins bruyants. N’hésitez pas à consulter l’un de nos conseillers !
ESTRYN-BÉHAR, M. Ergonomie hospitalière : théorie et pratique, 2e éd. augm., Toulouse, Octarès, 2011, 695 p.
MAKOPA KENDA, I., M. AGOUB, A.O.T. AHAMI. « Les effets du bruit sur la santé mentale: recension des écrits », Santé mentale au Québec, vol. 39, n° 2, 2014, p. 169-181.
INRS. Dossier Bruit (inrs.fr/risques/bruit